L’effet Lucifer, Patrick Clervoy
Comment devient-on un bourreau ? Quel est cet effet Lucifer qui incite l’homme à se muer en tortionnaire ?
l’homme peut infliger à son semblable plus de souffrance que ne peuvent lui en faire subir les animaux, les accidents ou les maladies. L’emprise du mal fonctionné comme une mécanique.
Cette incapacité à résister à l’emprise du mal, est désignée sous le terme de décrochage du sens moral.
Tout être possède une conscience qui lui permet de maîtriser ses pulsions agressives ou destructrices. Mais lorsqu’il s’intègre dans une structure organisationnelle marquée par des règles institutionnelles fortes, comme les forces de l’ordre ou l’armée, où domine l’obéissance, il perd ses capacités critiques et les ressources de sa morale personnelle. Son éthique individuelle s’efface pour laisser place à un psychisme uniquement préoccupé par les sanctions de l’autorité.
De nombreuses situations de décrochage du sens moral avec comportements cruels en groupe sont le résultat de la “loi de l’unité mentale des foules”. Des individus par le seul fait qu’ils composent une foule, quels que soient leur milieu social, leur niveau d’intelligence, leur origine culturelle, deviennent une personnalité collective qui les fait sentir, penser, réagir et se comporter d’une façon distincte de celle par laquelle chacun réagirait isolément.
Dans l’émergence de cette personnalité collective, l’individu en foule acquiert, par le seul fait du nombre un sentiment de puissance invincible qui lui permet de ne plus éprouver la contrainte de la répression sociale. L’individu est d’autant plus poussé vers ses instincts que, la foule étant anonyme, il éprouve une garantie d’irresponsabilité.
On attribue le terme “assassin” aux haschischins, les soldats persans ivres de cannabis dont la fureur au combat était redoutée de leurs ennemis.