Apocalypse cognitive, Gérard Bronner
La plupart des informations que nous traitons le sont inconsciemment. [A mettre en lien avec l’ouvrage “penser vite ou penser bien” ; c’est à dire laisser les émotions et les réflexes dominer ou raisonner (faire fonctionner le cortex préfrontal), faire des efforts pour mesures les conséquences]
Le cortex fronto-pariétal cingulaire en particulier, est convoqué dans le traitement conscient et cela ne se fait pas sans coût d’énergie. L’idée même d’une énergie mentale n’a rien de métaphorique. Elle doit être rapportée à la consommation de glucose dont notre système nerveux est friand : aucun autre organe humain n’en consomme autant.
Notre cerveau est un ladre (au sens grigou, lésineur). Il veut souvent obtenir le maximum en dépensant le minimum.
La réduction de l’incertitude et le besoin de routine deux impératifs de notre fonctionnement cognitif mais parallèlement un goût pour l’exploration du possible, le désir de surprise et l’appétit pour l’imprévu.
Les pulsions et le narcissisme sont des comportements qui découlent de notre fonctionnement hormonal. Les réseaux sociaux favorisent ces comportements, ou plutôt ils en sont la conséquence. En cela, ils polarisent les opinions et fragilisent la démocratie.
L’utilisation de Facebook peut créer beaucoup de frustration et de jalousie.
C’est un espace d’exhibition où chacun a tendance à se mettre en scène pour donner un aperçu flatteur de sa vie et à se comparer. Cela peut créer un sentiment d’insatisfaction chez les témoins de cette exhibition. Le narcissisme des autres blesse toujours un peu le nôtre. Cette situation révèle quelque chose de profond sur l’identité sociale de notre espèce sociale. Elle dévoile le difficile équilibre entre la volonté d’être différent de nos congénères mais pas au point de ne pas être intégrés parmi eux, comme le montre tous les phénomènes de mode.
Les informations égocentrées stimulent notre gyrus temporal supérieur, une zone du cerveau dévolue à ce type d’information. C’est la même zone du cerveau qui s’active quand notre prénom est prononcé ou quand toute sorte d’information nous convoque personnellement : “exemple Que dit votre signe astrologique ? Quel personnage de roman êtes-vous ?”
Le bonheur tient moins à ce que nous possédons objectivement qu’aux avantages que nous croyons avoir sur les autres. (exemple de la note 12/20, satisfaction ou non en fonction de la moyenne de la classe).
Notre aptitude au bonheur dépend de la disgrâce des autres.
Le sentiment d’accomplissement (qui se mesure en se comparant aux autres) paraît favoriser la bonne santé. Il aurait un effet positif sur le système immunitaire.
La métrique des réseaux sociaux indiquent l’intérêt positif que vous prêtent les autres. Cela produit une décharge de dopamine qui ressemble à une forme de bonheur.
Le terme d’apocalypse doit être pris au sens de révélation. La révélation des grands invariants de l’espèce humaine, de son fonctionnement cognitif et social, la révélation de ce que nous sommes réellement. [des glandes endocriniennes].
Le fait que notre cerveau soit attentif à une information égocentrée, liée à la sexualité ou à la peur. [En fait, tout ce qui nous renforce dans notre existence.]
L’existence même d’un espace d’échanges entre les individus (réseaux sociaux) est la conséquence directe de la nature sociale de notre espèce. [tout ça résonne avec le striatum].
Une partie du marché cognitif s’est organisée pour stimuler des attentes profondément implémentées dans notre cerveau en jouant sur les réseaux de production de dopamine.
Il faut distinguer la recherche du plaisir de la recherche du bonheur. Si le premier dépend directement de la production de dopamine, le second dépend lui de la sérotonine.
Nombre d’offres et de stimulations de notre environnement social convoquent la recherche du plaisir à court terme de notre cerveau.
L’utilisation [le captage] de notre trésor attentionnel (pour répondre à notre appétence de jouissance à court terme) est la question la plus politique et la plus déterminante qui soit.
[Incompétence, méconnaissance, besoin de reconnaissance, aculture et crédulité associés aujourd’hui à la capacité de diffuser, de devenir éditeur d’informations ou d’événements faux (des infox qui peuvent paraître vraisemblables) conduisent à la montée de croyances loufoques qui entretiennent des rapports avérés avec l’extrémisme politique ou religieux]
Quand l’offre informationnelle rencontre la demande (ce qui est attendu des lecteurs non avertis), cela vient renforcer les croyances et le sentiment d’appartenance.
La première impression a tendance à perdurer en matière d’information notamment sur un terrain de connaissances vierge ou peu étayées offrant peu de matière à comparer.
La voracité du cerveau et les injonctions de la visibilité sociale ne nous conduisent pas vers le rationnel.
La réalité, c’est ce qui continue d’exister quand on cesse d’y croire.